Cet article sur la mode durable a été écrit dans le cadre de la « Quinzaine de la Mode jetable » de HOP. Retrouvez tous les autres articles par ici.

La Quinzaine de la Mode jetable de HOP est sur le point de terminer et il est l’heure pour nous de nous interroger sur l’avenir de ce secteur. Entre scénario apocalyptique et lendemains radieux, c’est toute une industrie qui doit repenser sa place. HOP fait le point sur un futur plus proche que l’on ne pense.

Des leviers qu’il reste à actionner

1. L’écoconception au cœur des préoccupations

Point de départ de tout produit durable, l’éco-conception sera le pilier de la mode de demain. Ses principes permettent de prévoir les nombreux obstacles pouvant limiter la durabilité d’un objet ou d’un vêtement tout au long de son utilisation. Reprise tant par les géants du secteur que les marques de niche, c’est en réalité une multitude d’éco-conception qui cohabitent.

Chaque marque tente de se mettre à son avantage selon ses critères propres : résistance aux lavages, zones d’usures renforcées, usages de tissus recyclés, droits sociaux respectés. Si certains flirtent avec le greenwashing, tous ont généralement en commun de se concentrer uniquement sur la phase de production du produit. L’enjeu de l’éco-conception est pourtant de mieux comprendre le cycle de vie du vêtement et de ne pas se restreindre à la phase de fabrication. Aujourd’hui, l’usure est à l’origine de 50% de cas de séparation d’un vêtement (tache, trou, couleur…), les 50% restants sont liés à la lassitude ou à un changement de taille.

Pour être durable, le vêtement doit aussi être conçu pour être réparable : il faut prévoir en amont les accessoires (mercerie, bouton, zips, cordons, patchs, etc.) et leur disponibilité (possibilité de commander directement sur le site par exemple). Une éco-conception pensée de manière restreinte se prive donc de tout un pan de la durabilité.

Pour vous y retrouver, on vous conseille de toujours voir ce qu’il y a derrière les termes alléchants et de confronter le vocabulaire utilisé par la marque avec ses pratiques. Certains labels peuvent vous orienter dans votre démarche en vous informant sur la qualité de la matière utilisée (tel que Global Organic Textile Standard), l’impact social et environnemental (Max Havelaar par exemple) ou la provenance du produit (comme origine France garantie).

Pour le label le plus complet, la certification “Cradle to cradle” semble être la plus prometteuse. Elle passe en revue cinq catégories essentielles : la santé des matériaux, la réutilisation des matériaux, les énergies renouvelables et la gestion du carbone, la gestion de l’eau et l’équité sociale ; pour certifier un vêtement réellement durable.

Machine à coudre

L’enjeu de l’éco-conception est de mieux comprendre le cycle de vie du vêtement et de ne pas se restreindre à la phase de fabrication (©Andrea Piacquadio)

2. Une véritable traçabilité

Deuxième levier phare, la traçabilité permet d’identifier l’origine des matières premières et de reconstituer le parcours d’un vêtement. Elle n’est pas qu’une affaire de consommateurs désireux de plus transparence, mais un outil pouvant aussi bénéficier aux marques. Car si assurer la transparence est nécessaire, elle n’est pas chose aisée. Cela suppose d’instaurer une relation de confiance tant avec les consommateurs que les sous-traitants.

Raccourcir la chaîne de production (en passant notamment par des relocations) semble l’option la plus efficace à tous points de vue. En parallèle, l’idée d’émettre une carte d’identité pour chaque pièce de vêtement fait aussi son chemin. Dans les deux cas, cela permet de redonner le pouvoir au consommateur en lui permettant de faire des choix éclairés. Le petit plus de la carte d’identité ? La facilité d’accès aux informations même en cas d’achat en seconde main. La carte d’identité est également utile pour connaître le processus de recyclage du vêtement grâce à une information précise sur le tissu et ses composants.

3. Une législation à la hauteur des attentes

Adopter une nouvelle législation pour encadrer l’industrie de la mode est essentiel. Face aux difficultés du secteur, on peut s’interroger sur la viabilité du modèle législatif quand une marque proposant des vêtements à très faible impact environnemental est soumise à la même réglementation qu’une chaîne de fast-fashion comme PRIMARK. Le David contre Goliath n’aura pas lieu sans un soutien des autorités.

Deux jeans sur des cintres

Le modèle législatif doit être adapté aux marques proposant des vêtements à très faible impact environnemental (©Mica Asato)

Le cadre législatif est aussi nécessaire dans les pratiques quotidiennes de l’industrie mais rencontre lui aussi des obstacles à sa mise en œuvre. Dernier exemple en date, l’affichage environnemental textile. Son objectif est de concentrer en un visuel simple l’impact du produit sur l’environnement en prenant en compte des critères environnementaux tels que la pollution des milieux aquatiques, la consommation en eau, les émission de gaz à effet de serre. Sa phase d’expérimentation vient à peine de s’achever qu’il fait face à une levée de boucliers par l’industrie. Manque d’études fiables sur les méthodologie de mesure, concurrence déloyale pour le marché français vis-à-vis du marché commun, les arguments ne manquent pas pour tenter de ralentir le projet. Pourtant, c’est dès à présent que la France doit se saisir de ces enjeux si elle souhaite être pionnière en la matière. Pour hop et ses alliés, l’enjeu est de prendre en compte les indicateurs de durabilité émotionnelle (le nombre de collections, les volumes de mises en marché…), en suppléments des critères de durabilité physique qui concernent la solidité et la qualité des vêtements.

Au service d’une nouvelle philosophie

Enfin, la mode du futur répondra aux problématiques sociétales laissées en suspens en s’efforçant d’être plus inclusive sur tous les plans. Fini les tailles qui s’arrêtent au 42 et qui laissent sur la touche des millions de personnes désireuses de se vêtir durablement. Fini aussi les tee-shirts “féministes et engagés” produits par des employés aux confins du monde dans des conditions honteuses. Cette responsabilité élargie à l’internationale prendra aussi en compte l’impact sur les sols de la culture de la matière première et mettra au clair ses pratiques d’exportation de déchets textiles. La mode de demain assumera donc ses responsabilités envers toutes et tous.

Nous avions lancé la Quinzaine de la Mode jetable sur le constat édifiant qu’environ 130 milliards de vêtements étaient consommés par an, que leur production avait doublé entre 2000 et 2014, et que leur durée de vie moyenne avait baissé jusqu’à atteindre 35 jours en 2016. Comme vous avez pu le constater au fil de nos articles et des ressources pour aller plus loin, des solutions existent déjà pour transformer le secteur en profondeur. HOP reste pleinement mobilisé pour les défendre et pour accélérer la transition d’une mode jetable à une mode vraiment durable.

Pour aller plus loin :

 

Cette Quinzaine a été rendue possible grâce aux étudiants et aux consultants qui ont participé au programme d’Alter Action (Félix Dao, Léa Y., Valentin D., Marilou Schteyer-Meyer, Hilda G. et Sofiane M.) et à l’implication de Pablo Crosnier. Nous les remercions chaleureusement pour leur travail d’investigation.

Les articles de la Quinzaine de la Mode jetable :

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