La Convention citoyenne pour le climat (CCC) a fait de la régulation de la publicité un élément clé de son volet « Consommer », dans le but de réduire les incitations à la surconsommation. En effet, la publicité joue un rôle moteur dans le phénomène d’obsolescence culturelle et esthétique, en incitant au renouvellement massif d’équipements encore parfaitement fonctionnels, et dont la production et la mise au rebut a un coût environnemental et social non négligeable.

L’interdiction de publicité pour les produits polluants vidée de sa substance

Tandis que l’association HOP déplore le manque de régulation de la publicité, force est de constater que le projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets est clairement en deçà des propositions de la convention citoyenne pour le climat sur cet enjeu. HOP soutient l’interdiction des avions publicitaires (article 8), ou la mise en place d’une expérimentation de trois ans dans certaines collectivités de l’interdiction de publicité dans les boites aux lettres sauf si un « oui pub » est spécifiquement mentionné (article 9), néanmoins l’ampleur des mesures présentées n’est pas à la hauteur.

Alors qu’une « interdiction de manière efficace et opérante de la publicité pour les produits les plus émetteurs de GES, sur tous les supports publicitaires » était proposée, le Gouvernement souhaite circonscrire cette mesure à la « publicité en faveur des énergies fossiles » (article 4) pourtant déjà très rare. Cela reviendrait vider de sa substance la proposition initiale d’une « loi Evin sur le climat » (loi ayant interdit la publicité pour le tabac en 1991), incluant à terme l’ensemble des produits à fort impact. A l’article 5, le Gouvernement souhaite la mise en place d’un dispositif de « contrat climat », dit de co-régulation. L’objectif affiché est d’encourager les médias et annonceurs à mettre en œuvre un code de bonne conduite visant à réduire la publicité pour les produits polluants, dont le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) serait chargé du suivi. Le CSA ne dispose pas des ressources et compétences nécessaires pour challenger ces engagements volontaires. Basé sur le bon vouloir des acteurs publicitaires relevant plutôt de l’auto-régulation, ce dispositif risque fortement de s’avérer inefficace, voire contre-productif car pouvant servir de caution environnementale aux acteurs concernés. Il ne doit pas se substituer à un mécanisme contraignant d’interdiction de produits polluants identifiés par les pouvoirs publics.

Le Gouvernement justifie le retour à ce procédé pour ne pas assécher le financement des médias avec des interdictions formelles. Or, les interdictions seraient progressives (le temps que le procédé de l’affichage environnemental se mette en œuvre), ce qui permettrait au secteur de s’organiser. Surtout, l’objectif n’est pas d’interdire la publicité dans son ensemble, mais de l’interdire sur les produits les plus polluants et de la réorienter vers des produits plus responsables. Les budgets publicitaires concernés ne sont pas voués à disparaître, mais plutôt à être ré-alloués. Au passage, cela peut interroger sur la dépendance de certains médias envers les annonceurs. Selon HOP, cela va dans le sens de sa proposition d’une écocontribution qui serait mise en place sur les publicités pour financer des campagnes de promotion de la consommation responsable, et qui pourrait donc également être en partie réorientée vers le financement des médias.

Instaurer une réelle régulation de la publicité, en particulier de ses contenus

Au-delà de la question de l’interdiction de publicité pour certains produits, la régulation des contenus (et non pas seulement l’aspect « produits ») est complètement absente du projet de loi. HOP considère pourtant que cette question est primordiale, et ne peut pas être laissée entre les seules mains de l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP), organisme privée d’auto-régulation sectorielle. En déposant des plaintes auprès de son jury de déontologie pour des publicité véhiculant des messages controversés, HOP a fait le constat de ses limites. En effet, y compris lorsque la plainte est jugée fondée, le jury émet un avis non contraignant pour l’annonceur, et le dispositif ne prévoit aucune sanction.

  Ainsi, HOP regrette que la proposition de la Convention citoyenne « d’appliquer strictement l’article 9 de la recommandation « développement durable » de l’ARPP en interdisant les publicités incitant, directement ou indirectement, à des modes de consommation excessifs ou au gaspillage d’énergie et des ressources naturelles », n’ait pas été reprise. HOP salue la démarche et estime essentiel d’interdire les incitations à des modes de consommation excessifs, en incitant explicitement au renouvellement d’un produit fonctionnel ou au gaspillage par exemple, dans les publicités, et de donner à cette interdiction une valeur législative. Pour rappel, à ce jour la loi anti-gaspillage interdit uniquement « toute publicité ou action de communication commerciale incitant à dégrader des produits en état normal de fonctionnement et à empêcher leur réemploi ou réutilisation ». En complément, HOP préconise également d’introduire un principe de protection de l’environnement au cadre juridique de la publicité, en bannissant toute évocation ou représentation de comportement contraire à la protection de l’environnement et à la préservation des ressources naturelles (sauf pour le dénoncer).

Enfin, la publicité peut constituer un outil très utile de sensibilisation. Par ses contenus, elle est porteuse d’un imaginaire, qui doit être mis au service de la consommation responsable. HOP propose notamment d’établir des quotas pour les publicités pour des produits ou services écoresponsables à hauteur de 30% dans un premier temps, et comprenant 5% de messages de sensibilisation et émanant d’organisations à but non-lucratif par exemple. Toujours concernant le projet de loi climat, l’association regrette l’abandon de la proposition de mettre en place une mention légale contre la surconsommation sur les publicités. En effet, HOP préconise de telles mentions pour inciter à moins consommer et à utiliser ses produits plus longtemps. De même, l’association promeut l’intégration d’un module de sensibilisation à l’environnement et à la consommation durable dans les formations des publicitaires, afin de permettre cet infléchissement de la publicité.

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