Le Sénat a clairement renforcé le texte du projet de loi anti-gaspillage pour une économie circulaire sur le volet de la lutte contre l’obsolescence programmée lors de son examen en séance plénière, avec des dispositions essentielles pour soutenir la réparation et protéger les consommateurs, souvent contre l’avis du Gouvernement. L’association HOP appelle les députés de l’Assemblée nationale à soutenir et compléter ces avancées.

Suite à la récente publication du rapport sur la durée de vie des lave-linge publié lundi dernier, les sénateurs ont pris leurs responsabilités en votant pour plusieurs mesures fortes, issues du Livre blanc de HOP, afin de protéger les consommateurs, favoriser la durabilité, la réparation et le réemploi des objets.

Tour d’horizon des 10 principales victoires pour les citoyens à ce stade:

Un indice de réparabilité plus transparent

L’affichage obligatoire d’un indice de réparabilité a été voté par les sénateurs : il s’agit d’une avancée notable pour mieux informer les consommateurs et encourager les fabricants à concevoir des produits réparables. Le texte a renforcé la transparence en actant que le vendeur devra mettre à disposition du consommateur les paramètres ayant permis d’établir l’indice de réparabilité du produit, par tout procédé approprié. Les sénateurs se sont également assurés que cette information soit transmise sans frais aux clients. Toutefois, l’indice risque d’être repoussé dans le temps (de 2021 à 2022) et d’être peu visible. En effet, la dématérialisation de l’indice sur Internet uniquement le rendrait beaucoup moins utile. En revanche, les sanctions en cas de fausses déclarations ont été renforcées.

Un affichage de la durabilité obligatoire en 2024

Les sénateurs Frédéric Marchand (La République en Marche) et Joël Labbé (Rassemblement Démocratique et Social Européen), ainsi que leurs collègues, ont déposé deux amendements visant à créer un indice de durabilité obligatoire à horizon 2024, après une expérimentation de l’indice de réparabilité. Fortement attendue par les citoyens français et européens, c’est également une des propositions phares de HOP. Malgré l’avis défavorable de la rapporteure comme du Gouvernement, cet amendement a été adopté par le Sénat : une avancée qui, si elle était maintenue à l’Assemblée nationale, serait déterminante pour orienter les consommateurs vers les biens les plus fiables. A l’initiative d’Olivier Jacquin et du groupe socialiste et républicain (SR), le Gouvernement devra rendre compte des expérimentations prévues dès 2015 par la loi sur l’affichage de la durée de vie des produits.

L’irréparabilité des produits interdite

L’interdiction des techniques visant à rendre des produits irréparables a été adoptée, portée par Guillaume Gontard (CRCE), Joël Bigot (SR), Frédéric Marchand (LREM) ainsi que Joël Labbé (RDSE) et leurs groupes. Cette mesure représente un signal fort en faveur de la réparation et contre l’obsolescence programmée.

Les pièces détachées devront être disponibles pendant 10 ans pour le matériel médical, mais cela a été refusé pour d’autres catégories de produits. De nouveaux amendements, plus adaptés aux différents produits, pourraient être proposés à l’Assemblée nationale. Mauvaise nouvelle: le délai de livraison des pièces, initialement ramené à 20 jours par le projet de loi au lieu de 60 actuellement, a été repoussé à 30 jours.

Un fonds pour baisser le coût de la réparation

C’est une excellente nouvelle pour les consommateurs : une part des contributions perçues par les éco‑organismes finance un fonds de réparation, remboursant une partie des coûts de réparation d’un bien lorsqu’elle est effectuée par un réparateur labellisé. Les catégories de produits auxquelles s’applique ce mécanisme, la part des contributions affectées au fonds, les modalités de fonctionnement et de gestion du fonds, d’information du consommateur ainsi que de labellisation des réparateurs seront déterminées par voie réglementaire.

Un compteur d’usage obligatoire

Le Sénat a adopté un article rendant obligatoire la mise en place d’un compteur d’usage à partir de 2022, à l’instar du compteur kilométrique, sur plusieurs catégories de produits. Cette mesure phare du livre blanc de HOP, adoptée grâce aux sénateurs Joël Bigot (SR), Frédéric Marchand (LREM), Joël Labbé (RDSE) et leurs groupes, a pour objectif de renforcer la transparence sur la durée de vie des produits tout en facilitant l’entretien et en stimulant le marché de l’occasion.

Enseigner la réparation au collège

La proposition de HOP d’enseigner la réparation à tous les élèves dès le collège en cours de technologie a été largement reprise par les sénateurs de divers groupes politiques, et adopté par le Sénat avec l’aval de la rapporteure.

Léger encadrement de la publicité

Un amendement porté par la rapporteure pour interdire les publicités qui incitent à la mise au rebut des produits en état de marche a été conservé en plénière. C’est un bon début contre l’obsolescence psychologique, qui reste néanmoins insuffisant.

Des avancées contre l’obsolescence logicielle

L’obsolescence logicielle était la grande absente du texte : elle a cependant fait son retour lors des débats au Sénat, évoquée par de nombreux sénateurs comme un enjeu incontournable. Ainsi, un rapport gouvernemental sur l’obsolescence logicielle devra être rendu un an après la promulgation de la loi.

Plus encore, le Sénat a adopté une garantie logicielle, qui obligera les constructeurs à proposer des mises à jour pour les modèles de smartphones ou d’ordinateurs jusqu’à 10 ans après leur mise sur le marché.

Déception sur les garanties légales

De nombreux amendements ont été déposés pour allonger et améliorer les garanties légales, premier levier du consommateur pour se prémunir de l’obsolescence programmée, tous rejetés par le Sénat. Seul un amendement de Victorin Lurel (SR) visant à mieux informer le consommateur de l’existence d’une garantie légale a été adopté, prévoyant que le vendeur professionnel indique au consommateur sur le reçu de facturation la mention : “L’achat de ce produit s’accompagne d’une garantie légale de conformité”… sans toutefois en préciser la durée.

Des mesures bienvenues pour le réemploi et l’économie d’usage

Il est institué, par le Sénat, un fonds pour le réemploi solidaire. Ce fonds est chargé de contribuer au développement de la prévention des déchets par le réemploi et la réutilisation, exercées par des associations à caractère social.

De plus, le Sénat prévoit qu’à l’occasion du renouvellement des pneumatiques des véhicules légers et/ou lourds des services de l’État, de leurs opérateurs et des collectivités et des collectivités, la priorité doit être donnée aux pneumatiques rechapables ou rechapés.

Enfin, dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la loi, le Gouvernement devra remettre au Parlement un rapport sur les actions mises en œuvre permettant le développement de l’économie d’usage et de la fonctionnalité.

“Le Sénat s’est montré particulièrement progressiste et volontaire pour lutter contre l’obsolescence programmée, fédérant la plupart des groupes politiques. Les attentes sont désormais très fortes envers les députés, en particulier de la majorité gouvernementale, pour ne pas détricoter ces avancées mais au contraire les renforcer dans l’intérêt des citoyens et de l’environnement”

Conclut Laetitia Vasseur DG et co-fondatrice de l’association HOP.

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