Plongée au cœur des enjeux du métier de réparateur·ice
Retour sur une des table-rondes du colloque d'ouverture des Journées Nationales de la Réparation. On décortique les enjeux autour des métiers de la réparation.

À l’occasion de la troisième édition des Journées Nationales de la Réparation, le métier de réparateur et de réparatrice a été mis à l’honneur. Forte du partenariat inédit avec France Travail, la première table-ronde du colloque institutionnel a permis une plongée au cœur des enjeux d’un métier crucial à la transition circulaire. Réparer : une vocation et un savoir-faire pour un avenir durable ?

Pour échanger sur le sujet, HOP et Make.org accueillaient cinq panélistes : 

  • Marie Castagné – co-déléguée Générale du Réseau National des Ressourceries et Recycleries
  • Christine Doucement – chargée de développement des partenariats avec les entreprises et les fédérations chez France Travail
  • Régis Koenig – directeur Réparation et Durabilité chez Fnac Darty
  • Coralie Noel – haute fonctionnaire Développement Durable du Ministère de l’Éducation Nationale
  • Patrick Richard – directeur du Développement chez ecosystem.

Les échanges ont été modérés par Florent Curel, responsable du Club de la durabilité.

Le métier de réparateur et de réparatrice : enjeux croisés

Lors de cette table-ronde, tous∙tes les panélistes réuni∙es en ce 17 octobre convergent : les réparateur∙ices sont au cœur de la transition. Pour Régis Koenig, « il faut plus de monde dans le métier [de réparateur∙ice], c’est un réel enjeu de souveraineté ». Il s’agit d’un métier au cœur de l’économie circulaire, puisque sans réparateur∙ice il est impossible de tendre vers la circularité. Cependant, l’enjeu de la formation des futur∙es professionnel∙les de la réparation est fondamental. C’est un métier qui nécessite une formation « d’au moins cinq ans » pour être opérationnel selon Régis Koenig. D’autant plus que c’est une orientation professionnelle qui regroupe de nombreuses personnes en insertion par l’activité économique comme l’a souligné M. Castagné. Au-delà de son aspect fondamental pour l’environnement, se questionner sur ce métier c’est donc aborder également des enjeux sociaux.

Aussi, les métiers de la transition écologique sont parfois peu connus des adolescent∙es et jeunes adultes. Pour pallier à cela, l’éducation nationale « veut intégrer la durabilité dans l’enseignement scolaire » à travers « plusieurs chantiers en cours, tels que le renforcement des programmes scolaires sur les enjeux de transition écologiques depuis 2020 » comme le précise Coralie Noël. Ce qui est certain, c’est que pour avoir plus de réparateur∙ices, il faut déjà que ce soit un métier attractif et connu des jeunes générations.

Des dispositifs pour inciter à réparer chez soi, ou chez un∙e réparateur∙ice

Pour dynamiser le secteur de la réparation, des dispositifs sont mis en place. Le bonus réparation en est un. Issu de la loi Anti-gaspillage pour une économie circulaire (AGEC) et encouragé par HOP, il s’agit d’un dispositif visant à réduire la facture des réparations. Le bonus repose sur la labellisation des réparateur∙ices. Pour le consommateur, il s’agit de se rendre chez un l’un∙e d’eux/elles pour bénéficier d’une réduction immédiate sur la facture. Cette réduction peut aller jusqu’à 60 euros selon le type d’équipement concerné. Sur les appareils électriques et électroniques, c’est le label QualiRépar qui donne accès au bonus. Comme rappelé par Patrick Richard, ce sont plus de 71 catégories de produits qui sont concernées. Depuis son lancement en 2022, le label QualiRépar a couvert 1,6 million de réparations et ce sont plus de 16 000 techniciens QualiRépar labellisés sur tout le territoire rappelle le directeur du Développement chez ecosystem. Inciter à la réparation, c’est dynamiser le secteur. Néanmoins, la méconnaissance du dispositif et l’aspect payant de la labellisation freine le déploiement massif du bonus.

Par ailleurs, le savoir-faire de la réparation est aussi un enjeu personnel. Notamment porté par le Réseau national des ressourceries et recycleries (RNRR) et les Repair cafés qui parsèment le territoire, l’auto-réparation est le deuxième pendant du secteur. C’est aussi cet aspect que promeuvent les JNR. Généraliser l’auto-réparation, c’est aussi permettre à des personnes de changer leur rapport aux objets, voire de trouver une vocation.

Stimuler la vocation par la formation de réparateurs et de réparatrices

Pour stimuler l’attrait et faire découvrir une vocation, France Travail met en place un « dispositif d’immersion professionnelle grâce auquel le demandeur d’emploi peut aller découvrir un métier sur une durée variable » (C. Doucement, France Travail). Christine Doucement précise que cela vise à sécuriser le recrutement pour les structures tout en permettant aux futurs réparateurs et réparatrices de découvrir les conditions de travail. Il existe aussi un volet formation. Un∙e demandeur∙euse d’emploi peut bénéficier de jusqu’à 600 heures de formation en entreprise avant d’être embauché∙e.

En parallèle, il y a eu un récent développement du fonds formation. Il s’agit d’un dispositif de cofinancement du métier de réparateur∙ices entre une entreprise et un éco-organisme. Concrètement, l’entreprise labellisée QualiRépar peut demander le remboursement d’une partie de la formation à la fin de celle-ci. Le coût conséquent de la formation n’est cependant pris en charge qu’à la fin du parcours du/de la futur∙e réparateur∙ice. Ce qui pose des questions de financement à court terme de l’apprenti, qui peut coûter jusqu’à 25 000 euros par an, précise Régis Koenig.

Une formation marginale malgré des besoins grandissants

La formation ne relève pas uniquement d’acteurs publics ou d’entreprises. Le RNRR porte aussi des projets en ce sens. C’est par exemple le cas du projet d’école du réemploi solidaire comme le souligne Marie Castagné. Il permet notamment de faire « avancer le chantier de la professionnalisation » et prolonge le levier de la sensibilisation.

L’ouverture du colloque de la troisième édition des JNR a permis une mise à l’honneur du métier de réparateur∙ice. C’est encore une formation marginale malgré des besoins grandissants dans le cadre d’une économie circulaire. Lors des discussions, les cinq panélistes ont pu exposer leur approche de la formation à cette activité professionnelle ainsi que les chantiers à venir. Entre mise à l’honneur de l’auto-réparation, fonds formation et une démarche publique de visibiliser le métier, le constat est clair. Reste à voir si nous arrivons collectivement à créer la vocation pour ce métier d’avenir.

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