Le Parlement et le Conseil européens sont parvenus à un accord le 1er février sur le projet de directive « droit à la réparation ». HOP décrypte les nouveautés de ce texte prometteur.

L’objectif affiché de cette directive européenne est simple : simplifier la réparation des objets pour les consommateur·ices et la rendre plus accessible. Pour cela, un arsenal de mesures novateur a été négocié, notamment grâce à la pression de la coalition européenne Right to Repair, dont HOP fait partie. Mais sa portée reste encore incertaine tant certains termes restent larges et imprécis.

Faciliter la réparation

Les fabricants des produits concernés par ce texte devront proposer des services de réparation en cas de panne survenue en dehors de la garantie légale. Un bon point pour créer un intermédiaire supplémentaire de confiance pour les consommateur·rices souvent désemparé·es face à une panne.

Plus important encore, le texte interdit toutes clauses contractuelles et toutes techniques matérielles ou logicielles pour entraver les réparations. En particulier, ils ne doivent pas empêcher l’utilisation par les réparateur·ices indépendant·es de pièces détachées d’occasion ou de pièces détachées réalisées par la 3D. Les pratiques de sérialisation seront de nature à être interdite. HOP, qui lutte activement contre ces pratiques, se réjouit de ce grand pas en avant.

Néanmoins, nous restons très vigilant·es quant à la portée de cette mesure si des exceptions sont incluses dans le texte pour des raisons de “propriété intellectuelle”. En France, ces pratiques sont déjà interdites depuis la loi AGEC de 2020. Mais les textes d’application réglementaires manquants n’aident pas à faire appliquer cette loi.

Une plateforme européenne en ligne pour aider les consommateur·rices à localiser les ateliers de réparation locaux, les vendeurs de produits reconditionnés ou tout autre lieu de réparation comme les repair cafés devra voir le jour. Des sections de cette plateforme seront déclinées pour chaque pays membre.

Nous accueillons positivement cette nouveauté qui facilitera la démarche des consommateur·rices, et donnera plus de visibilité aux réparateur·rices. HOP estime que cette plateforme devra faire l’objet de communications nationales importantes pour qu’elle soit connue de tous. Il faudra également mettre en lien ces informations avec les plateformes existantes du réseau Qualirépar dans le cadre du bonus réparation, qui est un gage de confiance.

Rendre la réparation plus accessible financièrement

Grâce à ce texte, les pièces de rechange et les outils nécessaires à la réparation devront désormais être proposés à un prix “raisonnable qui ne fait pas obstacle à la réparation”. HOP, qui défend le pouvoir d’achat des consommateur·ices via l’allongement de la durée de leurs produits, se réjouit de cette inscription, puisque pour 68% des Françai·es le prix de la réparation est le principal frein à cette dernière. Nous restons cependant très vigilant·es à l’application qui en sera faite. Pour en apprécier le terme “raisonnable”, il apparaît comme indispensable que cette formulation si large soit définie plus précisément pour pouvoir contraindre les industriels à mettre sur le marché des pièces détachées à des prix qui n’empêchent pas la réparation. Par exemple, le seuil de l’Ademe pourrait être utilisé comme base de travail pour clarifier le texte, puisqu’on sait qu’en général, si le prix de la réparation dépasse 33% du prix du neuf, alors le ou la consommatrice préfèrera remplacer son équipement plutôt que réparer.

Nous déplorons par ailleurs que le critère prix n’ait pas été inclus dans les critères de l’indice de réparabilité européen des smartphones qui verra le jour en juin 2025. En effet, un fabricant qui propose des pièces à des prix abusifs pourra obtenir une bonne note, alors même que ses produits ne seront pas réparables au vu des prix proposés. Il est donc essentiel que cette formulation dans le texte susmentionné soit clarifiée par la Commission pour en assurer sa portée.

Le texte inclut l’obligation pour chaque État membre d’introduire au moins une mesure d’incitation pour encourager à se tourner vers la réparation : les fonds réparation, les campagnes d’information, les cours de réparation ou une réduction de la TVA sur les actes de réparation. HOP qui s’est battu en France pour l’instauration d’un fonds réparation, trouve cette disposition intéressante. Mais les impacts de ces mesures sont très variables. Il aurait été préférable d’inciter davantage à la mise en place systématique de bonus réparation dans les pays européens. L’exemple français montre en effet les effets positifs de ce système sur les consommateur·rices et les réparateur·rices, malgré des ajustements à réaliser. Retrouvez ici le rapport de HOP sur le sujet.

Un manque d’ambition quant à la priorité de la réparation pendant la garantie légale

En cas de produit défaillant pendant la période de garantie (deux ans), les fabricants devront proposer au consommateur·rice une option de réparation en plus du remplacement. Mais ce choix sera remis sur les épaules des consommateur·ices. Pour inciter ces derniers à choisir cette alternative, la directive impose que le produit réparé sera couvert par une extension de garantie d’un an. Mais cette nouveauté apparaît insuffisante pour les inciter à choisir cette option quand on sait que les produits de remplacement sont quant à eux couverts par une nouvelle garantie de 2 ans. Un coup manqué pour permettre de réduire considérablement la production de déchets électroniques. La priorité à la réparation dans le cadre de la garantie légale aurait été préférable.

Un champ d’application trop restreint

L’impact de ces mesures est nuancé par son champ d’application trop restreint. Seuls les produits couverts par des exigences de réparabilité seront concernés par ces mesures : c’est le cas des smartphones et tablettes, lave-linge, sèche-linge, lave-vaisselle, réfrigérateurs, écrans, équipements de soudage et bientôt aspirateurs.

HOP déplore que ces mesures prometteuses ne soient pas applicables à tous les équipements électriques et électroniques. La réparation étant un levier essentiel en Europe pour protéger les ressources de la planète et éviter l’accumulation des déchets électriques et électroniques.

 

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