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Sécurité et efficacité juridique du délit d’obsolescence programmée

By 19 août 2015mars 31st, 2017No Comments

Le délit d’obsolescence programmée défini et réprimé par un nouvel article L. 213-4-1 du Code de la consommation. Il faut se féliciter du premier pas ferme accompli par le législateur. L’outil existe. Toutefois, des difficultés d’interprétation peuvent naître de la rédaction actuelle du texte, alors même que la lecture des débats parlementaires révèle clairement la volonté d’une répression large de la part du législateur.

Pour cette raisons plusieurs précisions apparaissent souhaitables.

1.Préciser le point de départ de la prescription au moment de la révélation de l’infraction

La prescription pour les délits est de 3 ans. Par principe le délai de prescription ne commence à courir qu’à partir du moment où l’infraction a pu être révélée (donc en pratique lorsque le produit est devenu obsolète prématurément). Or, le produit pourrait devenir obsolète plus de trois ans après le point de départ de la prescription, révélant ainsi trop tard l’infraction. L’action publique serait alors prescrite et aucune condamnation pénale ne pourrait plus être prononcée.

Même s’il est fort probable que le juge estime qu’il s’agisse d’une infraction occulte, c’est-à-dire n’étant pas révélée immédiatement lors de sa commission (comme l’abus de biens sociaux par exemple) et qu’en conséquence, le délai de prescription ne commence à courir qu’à partir du moment où l’infraction a pu être révélée.

Pour éviter tout risque de mauvaise interprétation de la volonté du législateur, il serait bon de préciser que la prescription commence à courir au moment de la révélation de l’infraction, à l’instar de l’ensemble des délits occultes.

Proposition: Ajouter un alinéa à l’article L. 213-4-1 du Code de la consommation.

 

2. Préciser le terme de « metteur sur le marché »

Les auteurs de l’infraction d’obsolescence programmée sont « les metteurs sur le marché ». La définition de ce terme est donnée dans le Code de l’environnement concernant la partie relative à la responsabilité élargie du producteur et aux filières de recyclage.

Il convient de sécuriser la définition de « metteur sur le marché » au sens du droit pénal de la consommation en instaurant un alinéa supplémentaire dans l’article L. 213-4-1 du Code de la consommation, relatif au délit d’obsolescence programmée, qui disposerait spécifiquement sous ce délit qu’est un metteur sur le marché :

« toute personne qui fabrique, importe, assemble ou introduit pour la première fois sur le marché national à titre professionnel des éléments d’ameublement soit destinés à être cédés à titre onéreux ou gratuit à l’utilisateur final, quelle que soit la technique de cession, soit utilisés directement sur le territoire national. »

 

3. Instaurer une peine complémentaire d’interdiction de gérer et augmenter la peine d’amende encourue

Il peut également être relevé que l’article L. 213-4-1 du Code de la consommation ne prévoit pas, à ce stade, de peine complémentaire (comme, par exemple, l’interdiction d’exercer une fonction publique ou de gérer une entreprise ou une société, etc.). Cette omission apparait franchement curieuse puisque de telles peines ont été prévues pour réprimer le délit pourtant proche de tromperie modifié par la loi Hamon du 17 mars 2014 (article L. 213-1 et L. 213-6 du Code de la consommation).

Il conviendra de calquer le délit d’obsolescence programmée sur les autres délits du Code de la consommation, tant concernant les peines complémentaires que sur le montant de l’amende 10% du chiffres d’affaires (au lieu de 5% actuellement pour le délit d’obsolescence programmée), ou concernant le principe du quintuple de l’amende pour l’auteur personne morale.

Proposition: Modifier l’article L. 213-4-1 et L. 213-6 du Code de la consommation.

 

4. Protection des lanceurs d’alerte

La question de la preuve de la commission de l’infraction a été soulevée lors des débats. Comme pour les infractions dites occultes et internes aux entreprises (telles que l’abus de biens sociaux, par exemple), il est possible que d’anciens salariés ou collaborateurs jouent le rôle indispensable de « lanceurs d’alerte » et permettent ainsi la mise en œuvre de l’action publique sur le fondement d’informations internes aux entreprises délinquantes (échanges de mails, etc.).

Ces personnes doivent impérativement être protégées de toute responsabilité juridique par des procédures qui permettent d’assurer leur anonymat tout en donnant force probante à leurs témoignages, notamment par le biais de dénonciation encadrées auprès de la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF) ou des associations de défense des consommateurs.

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