Avec la création d’un délit d’obsolescence programmée, le Gouvernement a consacré légalement ce que tout consommateur avait déjà rencontré dans son quotidien : le raccourcissement de la durée de vie des produits.

De fait, l’existence de l’obsolescence programmée ne peut plus être remise en cause. Toutefois, il est nécessaire de se pencher sur des moyens concrets de lutter contre l’obsolescence programmée.

En effet, les dispositions pénales viennent uniquement sanctionner l’auteur des faits mais ne permettent pas de prévenir les conséquences des faits commis.

En matière d’obsolescence programmée et parce que les enjeux écologiques et environnementaux sont énormes, il convient d’améliorer la fiabilité des produits et prévenir l’abandon des biens devenus obsolètes.

Il apparait que, de tous les leviers légaux en matière de prévention mis à notre disposition, la garantie légale de conformité est un moyen stratégique pour lutter contre l’obsolescence programmée: les produits sont fait pour durer, au moins le temps de la garantie, sans quoi le constructeur ou le distributeur devront prendre à leur charge les coûts de la réparation.

Une garantie de 2 ans insuffisante

Actuellement, la garantie légale de conformité fixée à 2 ans (telle que prévue par les articles L. 217-4 et suivants du code de la consommation), n’est pas suffisante.

Le problème rencontré au niveau de la garantie légale de conformité est la durée, qui est de deux ans à compter de la délivrance. Durée qui s’avère être bien trop courte pour certains équipements électriques et électroniques dont l’achat peut parfois grever le budget d’un foyer.

Ceci dit, il est à saluer l’extension de la durée de présomption de défectuosité qui est passée de 6 à 24 mois pour les produits achetés après le 18 mars 2016. Ainsi durant 24 mois, si le produit tombe en panne, pèse sur ce bien une présomption de défectuosité. En clair, ce sera au vendeur d’apporter la preuve que le bien n’est pas entaché d’un défaut de conformité et que la panne est due à une autre pratique (notamment le mauvais entretien ou la mauvaise utilisation de l’acheteur).

Mais ce n’est pas suffisant, beaucoup trop de déchets sont issus de la pratique de l’obsolescence programmée : chaque habitant en France produit 590 kg de déchets par an dont 17 à 23 kg de DEEE (déchets d’équipements électriques et électroniques).

A l’occasion de la sortie prochainement d’un rapport du Gouvernement sur les moyens de lutter contre l’obsolescence programmée, nous demandons une extension progressive de la garantie de 2 à 5 ou 10 ans, selon les produits, afin de garantir aux consommateurs des biens vraiment fiables.

Pour information, dans les autres pays de l’Union européenne la durée de la garantie légale est de :

  • 2 ans dans la majorité des pays européens (Autriche, Belgique, Bulgarie, Croatie, République Tchèque, Chypre, Estonie, Danemark, France, Grèce, Allemagne, Irlande, Hongrie, Islande, Italie, Lettonie, Luxembourg, Lituanie, Malte, Norvège, Pologne, Portugal, Slovaquie, Roumanie, Slovénie et Espagne),
  • 3 ans en Suède,
  • 5 ans en Norvège et Islande pour les produits dont la durée de vie moyenne est plus élevée que 2 ans,
  • 5 ans en Ecosse, 6 ans en Irlande, Angleterre, Pays de Galles, Irlande du Nord,
  • durée de vie moyenne du produit aux Pays-Bas et en Finlande.

En prenant exemple sur certains états membres de l’Union européenne, HOP demande à ce que la durée de la garantie légale de conformité soit allongée à 5 ans pour la majorité des produits.

Une modulation possible suivant la catégorie de produit

A ce titre, HOP propose les durées suivantes pour la garantie légale de conformité, par exemple :

5 ans

Petits électroménagers tels que : radioréveil, fer à lisser, bouilloire, cafetière classique

Majorité des produits électriques et électroniques : Smartphone, ordinateur, tablette, télévision, machine à café, centrale vapeur

10 ans

Gros électroménagers : réfrigérateur, congélateur, voiture, machine à laver, sèche-linge…

Il faut admettre qu’une garantie longue pour certains produis peut être relativisée : on ne peut pas légitimement attendre d’un radioréveil qui a coûté 10€ qu’il dure 10 ans.

A contrario, appliquer une garantie de 2 ans sur un réfrigérateur qui a coûté 1000€ est totalement déconnecté des attentes des consommateurs : quand un foyer réalise un tel investissement, il peut légitimement s’attendre à ce que le réfrigérateur dure au moins 10 ans.

L’utilité d’un affichage de la durée de vie

A ce stade, il convient également de préciser qu’il est indispensable de prendre en compte le prix d’achat. Actuellement le rapport entre le prix et la durabilité est biaisé: acheter un produit plus cher n’est pas une garantie de fiabilité.

En effet, les consommateurs n’ont pas les mêmes attentes suivant le prix d’achat du bien : on s’attend toujours à ce qu’un téléviseur qui a coûté 3000€ dure plus longtemps que lorsqu’il a coûté 200€, et pourtant ce n’est pas toujours le cas. A choisir, on prendra alors souvent le moins cher. Cette course au bas prix réduit la qualité des matériaux utilisées, ce qui tire vers le bas l’ensemble des produits.

Ainsi, nous plaidons aussi pour un affichage de la durée de vie des produits. A cet égard, une étude du Conseil Économique et Social Européen et de Sircome démontre que l’affichage de la durée de vie des produits impactent nos choix de consommation: oui, nous voulons savoir si nos produits vont durer longtemps!

Passer par la loi, est-ce vraiment nécessaire ?

Bien sur, nous préfèrerions que les industriels proposent des produits durables, fiables, robustes et réparables. Nous préfèrerions qu’ils indiquent volontairement la durée de vie et qu’ils proposent de réelles garanties aux consommateurs de fiabilité et de réparabilité.

Aller chez le vendeur ou artisan du coin, même des années plus tard après l’achat, pour lui demander un geste commercial ou une réparation sur un bien tombé en panne était auparavant la norme.

Force est de constater que ce n’est plus le cas.

Si certaines marquent se lancent désormais dans cette voie, comme SEB qui propose désormais des produits réparables pendant au moins 10 ans, la plupart ne font que reculer.

Nous souhaitons donc que le droit à des produits durables et réparables soit généralisé et profite à tous. La loi reste encore le meilleur garant de la protection des droits des consommateurs.

Réparer, c’est mieux que du neuf!

Actuellement, il est possible pour le consommateur, en matière de garantie légale de conformité, de choisir entre la réparation ou le remplacement. Le distributeur peut également imposer l’un ou l’autre en fonction des coûts.

A ce titre, encore beaucoup de consommateurs et distributeurs préfèrent le remplacement du produit défectueux par un neuf plutôt que la réparation et ce, pour plusieurs raisons :

  • Immobilisation du bien pendant plusieurs jours voire plusieurs semaines, ce qui peut être réellement gênant lorsque le produit est utilisé de façon fréquente (téléphone, ordinateur, télévision, machine à laver…)
  • Peur que la réparation ne soit pas effective ou efficace
  • Obtention d’un matériel neuf contre retour d’un matériel déjà utilisé (depuis plusieurs mois)

Le distributeur cherche souvent à satisfaire le consommateur en lui offrant un produit neuf, ou en lui offrant un bon d’achat en espérant qu’il achètera un produit plus cher, ou un produit en plus, sans se préoccuper des conséquences environnementale en terme de déchets de cette politique commerciale.

Sans encouragement solide pour la réparation, et tant que le sort des biens défectueux remplacés ne sont pas connus par le public, il est à supposer que l’allongement de la garantie légale de conformité créera toujours autant de déchets, produisant l’effet inverse de ce qu’elle visait.

Aussi, il est essentiel de faire prévaloir la réparation plutôt que l’échange afin d’éviter d’accroître les déchets. Cette mesure inciterait d’ailleurs à recruter davantage de réparateurs, créant ainsi des emplois non délocalisables.

Les biens devront ainsi être mieux conçus pour être démontables et réparables plus facilement.

Qui prend en charge le coût de la garantie légale?

Une garantie légale est offerte gratuitement aux consommateurs. Qui prend en charge les coûts de l’obsolescence programmée, le distributeur ou le fabricant?

L’échange ou la réparation du produit défectueux est une difficulté économique qui se pose notamment entre le fabricant et le vendeur que peu de consommateurs appréhendent.

Déjà parce que l’échange du produit défectueux peut générer un déchet dans la mesure où l’on ne sait pas ce qu’en fait le vendeur après retour du produit en panne : le renvoie-t-il au fabricant ? le jette-t-il ? le recycle-t-il en interne ou selon les filières officielles ? le répare-t-il pour ensuite le revendre ?

Ensuite, les relations entre fabricants et vendeurs sont opaques et semblent se jouer en fonction d’un rapport de force entre les deux. Les fabricants ont besoin des distributeurs pour assurer les ventes, tandis que les distributeurs sont dépendants des produits des fabricants. A l’heure actuelle, sur une garantie légale de 2 ans offerte à tous les consommateurs, la prise en charge des coûts de la garantie est souvent répartie à part égale entre eux (un an chacun).

Par exemple, si un consommateur a acheté son téléphone portable à un opérateur de téléphonie (vendeur), le consommateur, en cas de panne, est couvert 2 ans par l’opérateur de téléphonie mais ce dernier n’est couvert qu’un 1 an auprès du constructeur du téléphone.

Par ailleurs, pour accompagner la transition et les impacts économiques d’une extension de la garantie, celle-ci doit être mise en place progressivement dans le temps.

Ainsi, l’extension de la garantie de 2 à 5 ou 10 ans, devrait s’accompagner de mesures pour garantir une juste répartition des coûts entre distributeurs et vendeurs, afin de protéger les professionnels mais également les consommateurs face à des hausses des prix.

Par conséquent, l’allongement de la garantie légale de conformité doit être mesurée pour prendre en compte les attentes des consommateurs, les enjeux économiques de tous les acteurs impliquées et les enjeux écologiques.

HOP demande donc une extension de la garantie légale de conformité, progressive et modulée en fonction des biens.

Pour faire avancer nos droits, nous interpellons, avec d’autres associations, le Gouvernement. Signez la pétition!

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